Montréal, 6 novembre 2025 – Le FAEJ intervient auprès de la Cour suprême du Canada pour demander que soit reconnu le fait que la disposition relative à l’égalité des genres dans la Charte canadienne des droits et libertés peut et devrait être utilisée pour invalider le Projet de loi 21 en le déclarant inconstitutionnel.
En septembre, le FAEJ a déposé son mémoire d’intervention dans l’affaire Commission scolaire English-Montréal et al. c. Procureur général du Québec et al. (CSEM). L’affaire CSEM concerne la constitutionnalité du Projet de loi 21, intitulé Loi sur la laïcité de l’État. Cette loi interdit notamment aux personnes qui travaillent dans des institutions publiques désignées (y compris les écoles) de porter des symboles religieux sur leur lieu de travail et de se couvrir le visage dans l’exercice de leurs fonctions.
Cette loi a des impacts discriminatoires considérables sur les femmes musulmanes du secteur de l’éducation au Québec qui portent un hijab ou un niqab ainsi que sur les femmes musulmanes au Québec en général. Comme l’ont déclaré des organismes féministes (dont le FAEJ) qui se sont opposés à l’élargissement de la loi 21 plus tôt cette année :
« [L]’interdiction du port de signes religieux a des impacts désastreux sur leur parcours professionnel, les limite dans leurs choix de carrière et porte atteinte à leur sécurité économique. À cela s’ajoute une augmentation des violences psychologiques et physiques à leur endroit. Ces femmes, bien souvent racisées, relatent vivre plus de harcèlement au travail et être davantage les cibles d’intimidation et d’insultes dans l’espace public ou sur les réseaux sociaux. Elles doivent constamment faire preuve de stratégies et d’hypervigilance pour faire face à l’exclusion, à la discrimination et à la haine légitimées par cette loi. »
Il est difficile de contester la loi, car le gouvernement du Québec a invoqué la disposition de dérogation dans ce cas. Cette clause permet à une loi de rester en vigueur même si elle porte atteinte à certains droits garantis par la Charte canadienne, ce qui la rend beaucoup plus difficile à contester devant les tribunaux.
La disposition de dérogation ne s’applique pas à toutes les parties de la Charte. Dans notre mémoire, nous demandons à la Cour suprême de donner plein effet à l’article 28 de la Charte, qui garantit l’exercice égal des droits garantis par la Charte pour les personnes de tous les genres. Lorsqu’une loi limite de façon disproportionnée la capacité des femmes à exercer leurs droits – comme le droit à la liberté de religion –, elle porte atteinte à l’article 28. C’est exactement ce que fait le Projet de loi 21.
De plus, nous soutenons que l’article 28 n’est pas assujetti à la clause dérogatoire, ce qui signifie qu’il demeure possible que le Projet de loi 21 soit déclaré inconstitutionnel.
« Depuis quarante ans, l’article 28 est ignoré », souligne Ruth Goba, directrice générale du FAEJ. « Maintenant que des gouvernements du pays s’appuient de plus en plus sur la disposition de dérogation pour adopter des lois qui portent atteinte à des droits humains fondamentaux, le temps est venu que la Cour agisse. L’article 28 est une solide garantie constitutionnelle de l’égalité entre les genres – et la Cour doit le reconnaître comme un outil qui a le pouvoir de résister à la disposition de dérogation. »
Téléchargez le mémoire du FAEJ (en anglais seulement).
Maîtres Véronique Roy, Simon Bouthillier et Anita Badaku-Kpalley (du cabinet McCarthy Tétrault LLP) ainsi que maître Cee Strauss (avocat·e principal·e employé·e du FAEJ) représentent le FAEJ dans cette intervention.
Le FAEJ remercie les membres de son comité consultatif sur cette affaire, qui ont contribué à élaborer cette intervention : Sara Arsenault, Beverley Baines, Natasha Bakht, Nathalie Léger et Colleen Sheppard.
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À propos du Fonds d’action et d’éducation juridique pour les femmes (FAEJ)
Le Fonds d’action et d’éducation juridique pour les femmes (FAEJ) est un organisme national à but non lucratif qui œuvre à la promotion de l’égalité des femmes, des filles et de toutes les personnes qui vivent de la discrimination fondée sur le genre au Canada. Il s’acquitte de cette mission par le biais du contentieux, de la réforme du droit et de l’éducation juridique du public. Depuis 1985, le FAEJ est intervenu dans plus de 100 affaires en justice qui ont contribué à façonner la Charte canadienne des droits et libertés et ont permis de lutter contre la violence à l’égard des femmes et des personnes de genres divers, de s’opposer à la discrimination en milieu de travail, de favoriser l’accès aux libertés génésiques et d’améliorer les prestations de maternité, le soutien aux conjoint·e·s et le droit à l’équité salariale. Pour en savoir plus, consultez www.leaf.ca.